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Festival d’Avignon : «Le trac est un bon copain ! Meilleur que le stress»

La compagnie l’Oiseau-Mouche, également établissement et service d’aide par le travail, présente au festival in «Bouger les lignes, histoires de cartes». Rencontre avec Nicolas Van Brabandt, l’un des quatre merveilleux acteurs
On se croirait parfois chez Raymond Devos. (Christophe Raynaud de Lage)
publié le 11 juillet 2021 à 8h52

Vous aussi, vous n’arrêtez pas de vous perdre et ne savez jamais précisément où vous êtes ? Et vous cessez d’écouter dès qu’on vous indique un trajet à grand coup de troisième à droite et de perpendiculaire à gauche ? Alors Bouger les lignes, histoires de cartes, un spectacle jeune et vieux public, emporté par quatre merveilleux acteurs de L’Oiseau-Mouche, cette compagnie unique en France, installée à Roubaix et composée de deux douzaines d’acteurs dont les handicaps mentaux sont reconnus par la sécurité sociale, est pour vous ! C’est fou ce qu’on peut se sentir de plain-pied avec Mathieu Breuvart, Caroline Leman, Florian Spiry et Nicolas Van Brabandt, quatre têtes enfoncées dans les trous d’une paroi dès leur première apparition : «C’est bien ici ?» «Oui, ici, c’est ici !» Mais où ici ? On se croirait chez Raymond Devos. On est dans un texte de Nicolas Doutey, des cartes et panneaux dessinés par Paul Cox et une mise en scène de Bérangère Vantusso. C’est la première fois que l’Oiseau-Mouche, seule compagnie avec la Comédie française à être constituée d’acteurs salariés toute l’année et à pratiquer l’alternance, est invitée dans le in d’Avignon. Pour fêter l’événement, rencontre avec l’un des quatre acteurs de la pièce, Nicolas Van Brabandt, à l’emploi du temps de ministre car la troupe joue deux fois dans la journée. Entretien.

Comment vous sentez-vous en sortant de scène ?

Il me faut un moment avant de redescendre parce que nos personnages sont plein de vie. Cela fait cinq ans et demi que je suis comédien professionnel. Si j’avais l’impression de bosser ou d’être en taule, il faudrait que je change de métier.

Pour reprendre une question du spectacle, où êtes-vous, Nicolas ?

On pourrait dire qu’on est dans un jardin, qui se trouve à Avignon, ville qui est en France, pays qui est sur la Terre. Je suis à Avignon mais c’est assez relatif. Il y a le lieu physique mais aussi sentimental. L’histoire modifie la carte intérieure de mes perceptions.

Votre carte intérieure, dites-vous ?

C’est un grand chambardement ! J’ai compris qu’Avignon était un festival très intéressant donc j’ai vraiment de la chance d’être tombé dans le bon spectacle qui nous permet d’y être. C’est détendu mais pas trop. C’est un équilibre subtil. On ne peut pas s’empêcher de parler avec les répliques du spectacle.

Jouer deux fois dans la journée, est-ce très exigeant ?

La difficulté, c’est de prendre le temps de manger et de revenir à la concentration. Bérangère ne veut pas qu’on prenne des steak frites, elle pense que c’est trop lourd. Moi, j’en ai marre du poisson. Quand on veut faire une bonne représentation, il faut chasser ce qu’il y a à côté. Quand quelque chose me tracasse, je suis moins présent sur le plateau et ça se voit. Ça demande beaucoup plus d’énergie quand on doit surpasser ce qui nous embête.

Vous aidez-vous entre acteurs ?

Il le faut car quand quelqu’un flanche, tout le groupe flanche. Quand on a un trou, on essaie de le faire couler. On s’arrange. On est très forts ensemble. C’est une autre réplique de la pièce.

Vous connaissez le trac ?

Un bon copain ! Meilleur que le stress. J’ai un ami qui ne peut écrire que sous stress.

Avant d’être acteur, aviez-vous un autre métier ?

Je faisais du conditionnement de fond de hotte.

Vous souvenez-vous des auditions qu’a fait passer Bérangère Vantusso?

Il fallait improviser autour de la carte et l’idée d’être un peu perdu. Je lui ai parlé de la carte de mes idées noires et de mes pensées. C’est clair que là haut, je fais trois fois le tour du pâté de maison sans pouvoir entrer dans une case.

Vous vous perdez beaucoup ?

Je me suis suffisamment égaré sur les chemins de la vie, pour ne pas me perdre ailleurs...

Bouger les lignes, Histoires de cartes, création au festival d’Avignon puis grande tournée dans toute la France jusqu’en mai 2022. Dates les plus proches : le 18 et 19 septembre Festival Mondial des théâtres de Marionnettes à Charleville-Mézières, du 5 au 8 octobre à l’Oiseau-Mouche à Roubaix, du 21 au 27 octobre au Studio théâtre de Vitry, du 17 au 19 novembre à la scène nationale de Dunkerque