Les filles et les femmes sont nues, les garçons aussi, des épiphanies qui apparaissent dans les lumières de Mami, pièce spirituelle du jeune Mario Banushi, 26 ans. «Mami» ou le nom qu’il a donné à toutes les femmes qui l’ont élevé, sa mère qui le confie à sa grand-mère en Albanie, sa belle-mère, ses sœurs, ses tantes, toutes «Mami» comme celles qui habitent le paysage désolé sur le plateau du gymnase Aubanel. C’est un coin perdu à peine éclairé d’un lampadaire à jardin – superbe travail de Stephanos Droussiotis entre les éclairages du photographe Gregory Crewdson et les nuits de jour de Magritte –, un chemin qui trace une courbe et une toute petite maison en parpaings, construction brute de décoffrage, une seule pièce, une porte, pas de fenêtre.
On est dans la banlieue de rien, mais c’est là que tout arrive : un accouchement, une fille à vélo, une vieille femme lavée, changée, dans les bras d’un garçon qui pourrait être son fils pour une pietà inversée. Ici, chacun, chacune prend soin de l’autre avec des gestes calmes et ralentis, parce que toute action est une cérémonie. Il n’y a pas d’acteurs, mais six officiants. Dans ce paysage excentré, sourd aux vociférations de la Tragédie, ouvert au silence mythologique, personne ne joue.
Les tableaux ne parlent pas
Rien n’est fixé dans ce monde où la beauté plastique ne fait pas l’économie de la douleur ; une fille nue, à la pose botticellienne, déshabille un éphèbe jusqu’à former un couple-baiser comme on les adore chez Klimt. L’image est vaporeuse, dess