Le ciel est bleu, le temps est encore bon à Tel-Aviv, dans la douceur d’un hiver levantin. Un son de house tropicale sort d’un café, dont la terrasse est à moitié pleine, même au milieu d’une matinée de semaine. Soudain, le bruit d’un F35 invisible déchire le ciel, volant vers le sud et la bande de Gaza, à cinq minutes supersoniques. Le calme est trompeur : la guerre embrume tous les esprits, comme le bourdonnement du drone d’observation qui tourne au-dessus des têtes, invisible mais constant depuis qu’Israël pilonne Gaza en réponse aux attaques du Hamas le 7 octobre.
Gal et Nayef s’assoient côte à côte. Il est grand, longiligne, a des boucles noires aplaties sous une casquette. Les cheveux de Gal, rassemblés, tombent en vrac sur sa robe marinière. Elle est juive ashkénaze, lui palestinien musulman. Tous les deux n’ont pas choisi d’être citoyens de l’Etat hébreu : elle est née à Tel-Aviv, lui à Haïfa, deux grandes villes tournées vers la Méditerranée, capitales culturelles de l’espace israélo-palestinien.
Dans leur couple soudé, ils parlent de tout, «surtout ce qui nous met mal à l’aise» plaisante Gal Rosenbluth. Ils ne peuvent pas ne pas parler de cette guerre, la plus meurtrière, la plus catastrophique à avoir touché la Terre sainte depuis 1948, qui a tué plus de 22 000 personn