Pour la rétrospective qu’il consacre à la longue carrière de Georg Baselitz, le centre Pompidou a poussé les cimaises pour dégager dans les salles du sixième étage tout le recul et le vide que réclament les toiles de l’artiste allemand, si grandes, si pleines, tapageuses avec leur cortège chaotique de personnages cabossés et dégoulinants. De sueur, d’effroi, de mal-être. Ils ne savent pas, dirait-on, où se caser dans ses tableaux, qui pourtant, donc, sont assez grands pour qu’ils s’y tiennent avec aplomb, sans se tordre en tous sens ni, quand ils partagent le cadre à plusieurs, se bousculer, se chevaucher, s’entasser les uns contre les autres. Baselitz, à l’orée des années 60, pousse déjà la peinture dans ses retranchements, en en faisant pour la figure humaine un terrain glissant, fangeux, accidenté. Dans la première toile de l’exposition, le jeune artiste (il a alors 22 ans) dépeint sa tronche hydrocéphale, en forme de bulbe verdâtre percé d’yeux, d’un nez et d’une bouche minuscule. Cet homoncule, dont même le titre réduit le prénom de l’artiste à sa seule initiale (Tête-G), est auréolé d’une espèce de couronne de taches comme si la peinture elle-même balbutiait sa touche. En ligne de mire de la salle suivante, quatre têtes chauves emmanchées de longs cous mous, semblant sortir d’un terrier ou d’une carapace hors-champ, se hissent dans le cadre de ce tableau au fond rougeâtre, dévisagent le spectateur d’un œil impassible. A côté : une série de pieds, noueux, massifs
Exposition
Georg Baselitz, esthète à l’envers
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«Les filles d’Olmo II» montre comme Baselitz s’est libéré de son obsession du passé. (Bertrand Prévost/Centre Pompidou. MNAM-CCI. RMN-GP)
publié le 21 décembre 2021 à 5h09
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