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Rendez-vous

Godard et «Libé», de la glace à la grâce

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Malgré des premières rencontres intimidantes et peu loquaces, dans les années 80, le cinéaste et les journalistes ont fini par s’apprivoiser au fil des années et des entretiens.
Jean-Luc Godard en octobre 1998 dans les locaux de «Libération». (Richard Dumas/Vu pour LIbération)
publié le 13 septembre 2022 à 21h44

Toute première fois en août 1983 sur la terrasse de l’hôtel Excelsior à Venise. Godard présente à la Mostra Prénom Carmen. Un déjeuner est organisé par l’attaché de presse Claude Davy. Sont présents : Serge Toubiana des Cahiers du cinéma, Serge Daney et moi-même pour Libé, Maruschka Detmers et Jacques Bonnaffé, les deux acteurs du film. Toubiana et Daney ont sorti les prie-Dieu. Je n’en mène pas large en bout de table pour avoir écrit dans Libération des articles un peu rudes sur la période «ciné-tracts» de Godard. Il lit ostensiblement dans France-Soir les chroniques sur le tournoi de tennis de Roland-Garros. Soudain, il me toise : «Je crois que vous n’aimez pas beaucoup ce que je fais ?» Moi, d’une voix blanche : «Euh, non, pas tout.» Godard : «C’est ça qui m’intéresse, les gens qui n’aiment pas mes films.»

Venise encore, août 1985. Cette fois dans le restaurant du Grand Hôtel des Bains pour parler en tête à tête de Je vous salue, Marie. On n’a pas grand-chose à se dire. Il est peut-être plus intimidé que moi. Il me confie que lorsqu’il était critique aux Cahiers dans les années 50, lorsqu’on parlait de f