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Libération
Critique

«J’émerge», journal d’un Liban haut en douleurs

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Explosions à Beyrouth: la colère des Libanaisdossier
Associant textes et photographies, Fouad Elkoury relate au jour le jour trois ans de sa vie dans un pays en déliquescence, marqué par la banqueroute, une «révolution» avortée et l’explosion dans le port de Beyrouth.
Photographie extraite de «J’émerge», prise le 28 février 2020. (Fouad Elkoury/Ed. Intervalles)
publié le 6 décembre 2023 à 21h06

Le 6 juin 2019, soit un an et deux mois avant la terrible explosion d’un entrepôt dans le port de Beyrouth, Fouad Elkoury écrit : «L’électricité n’arrive plus qu’au compte-goutte, deux à trois heures par jour, comme si Prométhée avait décidé de ne plus regarder de ce côté de la Méditerranée. C’est alors que je décide de réaménager la maison familiale dans la montagne, à moins d’une heure de la capitale.» Le photographe franco-libanais, qui vit depuis toujours entre Paris, où il est né en 1952, et Beyrouth, où il a fondé la Fondation arabe pour l’image en 1997, réside au Liban cette année-là. Il veut être parmi ces centaines de milliers de Libanais qui manifestent dans les rues pour protester contre l’incurie de la classe politique. Observateur attentif et engagé des soubresauts du Proche-Orient depuis les années 70 et la guerre du Liban, il entend bien saisir, avec son appareil, cette «révolution» en marche.

Et il ne va pas seulement photographier cette révolution, que l’on aperçoit à peine dans ce livre – à part la formidable photo d’un manifestant assis, seul au milieu d’une place, parlementant avec un gendarme de la sécurité intérieure qui le surplombe –, il va photographier toutes ces infimes traces de vie qui bientôt vont voler en éclats mais, le 23 octobre 2019, il ne le sait pas encore.