Après avoir péniblement renversé une armoire de grand-mère pour la transformer en marchepied de fortune et atteindre un trou dans la toiture d’une maison en passe de s’effondrer, Somerville nous assaille avec un de ces plans à la magistralité lugubre que le jeu saura si bien cultiver durant les trois heures nécessaires pour le traverser. Une image de cinéma construite autour d’une maison typique de la campagne britannique, installée sur la droite de l’image, dont la charpente forme un inquiétant «V» qui tranche avec une énorme cheminée dont le dernier résidu de perpendicularité souligne la majesté décatie de la bâtisse. Sur la gauche du plan, dans le fond de l’image, des monolithes fichés au sol à 45 degrés, comme des flèches tirées par un dieu colérique. Absorbé par la lecture de la scène, le joueur remarque à peine combien le personnage qu’il incarne, trentenaire émacié, père de famille soudainement seul, est relégué au second plan. D’autant plus éclipsé par les lieux qu’il se fond littéralement dans ce décor en gris et vert. La déambulation dans cet endroit familier brutalement déréglé est rendue encore plus sinistre par le fait qu’on est rapidement appelé par ces formes géométriques qui gisent là où se tenait autrefois une grange, et qu’à mesure que le personnage s’éloigne de la maison pour s’enfoncer dans l’arrière-plan il rapetisse et se détache soudainement du décor, petite silhouette noire sur la campagne grise. Puis le joueur se trouve rappelé sur le devant d
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«Somerville», un cas d’espace
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L’avatar du joueur est réduit à l’état de petite chose insignifiante, écrasée par son environnement. (Jumpship)
par Marius Chapuis
publié le 3 décembre 2022 à 19h03
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