Désert du Néguev, au sud d’Israël. Des combattants en treillis militaires, coiffés du bandeau vert du Hamas, débarquent en parapente sur une base des Forces de défense israéliennes. Une fois au sol, ils exécutent par une balle dans la nuque cinq soldats alignés à genoux, les mains sur la tête. Cette scène, rappelant les attaques du 7 octobre 2023, est tirée d’une mise à jour du jeu vidéo Fursan-al-Aqsa : The Knights of the Al-Aqsa Mosque. Elle a été jugée suffisamment choquante pour que, sur demande du Counter Terrorism Internet Referral Unit (CTIRU), l’unité de référence internet antiterroriste du Royaume-Uni, la plateforme Steam retire le jeu de son catalogue britannique. Il demeure toutefois accessible dans la plupart des pays du monde, dont la France.
Sorti en avril 2022, le jeu permet à l’origine de se mettre dans la peau d’un militant palestinien tuant des soldats des forces de défense israélien. La récente mise à jour colle à l’actualité et réplique les attaques du Hamas. «Où sont ceux qui portent les ceintures explosives ? Où sont-ils ? Venez ici, je veux une ceinture d’explosifs pour me faire exploser au-dessus des sionistes !» peut-on entendre dans la bande-annonce de cette nouvelle version.
Même si la description du jeu sur Steam ne mentionne pas directement le Hamas, une publication du compte dédié au jeu sur X (ex-Twitter) parle de «revivre la gloire du 7 octobre, jour où la courageuse résistance palestinienne a humilié Israël».
Le développeur dénonce un «deux poids, deux mesures»
De son côté, le développeur brésilien Nidal Nijm attribue le blocage de son jeu au Royaume-Uni à des «motivations politiques» dans un article publié par 404media. Les autorités britanniques ont accusé Fursan-Al-Aqsa : The Knights of the Al-Aqsa Mosque d’être de la «propagande terroriste», affirme-t-il. La chaîne YouTube dédiée à son jeu vidéo a d’ailleurs été supprimée.
Enquête
Nidal Nijm se défend d’avoir développé un jeu qui «n’est pas différent de n’importe quel autre jeu de tir sur Steam, comme Call of Duty, par exemple». «Selon la logique erronée des autorités britanniques, le plus récent Call of Duty Black Ops 6 devrait également être interdit. En incarnant un soldat américain et en allant en Irak pour tuer des Irakiens. Ce que je peux dire, c’est que nous voyons clairement deux poids, deux mesures» a-t-il poursuivi.
La série de jeux vidéo Call of Duty avait elle-même été au cœur d’une polémique avec son opus Modern Warfare 2, sorti en 2014. Un niveau du jeu permettait au joueur de participer à une fusillade de masse dans un aéroport russe aux côtés de terroristes. Face au scandale, certaines versions du jeu ont été modifiées dans plusieurs pays : au Japon et en Allemagne, le fait de tuer un civil dans cette mission est un échec, en Russie le niveau entier a été supprimé.
On n’est toutefois pas dans les mêmes ordres de grandeur. Si Call of Duty Modern Warfare 2 s’est vendu à quelque 25 millions de copies, Fursan-Al-Aqsa : The Knights of the Al-Aqsa Mosque n’a pas connu le même succès, avec des ventes estimées entre 7 000 et 36 000 exemplaires selon le site SteamDB. Le nombre de joueurs actifs demeure très faible, avec un pic à seulement 16 joueurs simultanés le 19 février 2024.