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Théâtre

«La guerre n’a pas un visage de femme» de Julie Deliquet : larmes rouges

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Les viols, les combats, puis l’invisibilisation dans l’histoire officielle… Les engagées volontaires soviétiques de la Seconde Guerre mondiale sortent de l’ombre au Printemps des comédiens à Montpellier, où les non-dits deviennent criants. Un spectacle vibrant qui résonne avec l’actualité ukrainienne.
Dans «la Guerre n’a pas un visage de femme», neuf femmes racontent leur Seconde Guerre mondiale dans un appartement communautaire du temps de l’Union soviétique. (Christophe Raynaud de Lage)
publié le 1er juin 2025 à 17h35

Elles sont neuf ou plutôt dix avec Svetlana Alexievitch (Blanche Ripoche), journaliste inconnue lorsqu’elle entame ce qui sera son premier livre polyphonique qui interroge la guerre vécue par les femmes, ces millions d’enrôlées volontaires à des postes très différents pour défendre «la mère Patrie», et dont le point de vue n’avait alors jamais été écouté, comme si, une fois la paix établie, elles n’existaient plus. La jeune Svetlana Alexievitch, née en 1948, recueille tous les détails omis lorsque la guerre est narrée par les hommes, en général sous l’angle de l’héroïsme et de la victoire. A sa sortie en 1985, son livre fit scandale avant de devenir un best-seller quand Gorbatchev en fit l’éloge dans un discours.

Elles sont donc neuf ou plutôt dix, dans un appartement communautaire du temps de l’Union soviétique et le public qui les regarde s’installer, apporter des chaises, ne peut s’empêcher d’inventorier toutes les louches (de différents rouges) dans la cuisine, les égouttoirs, les bouilloires, la gazinière, les malles qui s’entassent en haut des armoires, les caisses, les lits repliés, les petites sculptures de chevaux, les prises électriques, le piano. Le regard entre dans la chambre à l’arrière-fond, pour détailler les dessus-de-lit et