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Critique

«Le Firmament» au Théâtre du Rond Point : treize femmes en huis clos

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Chloé Dabert met en scène le texte de la dramaturge britannique Lucy Kirkwood : dans l’Angleterre du XVIIIe siècle, un jury de mères de famille tient entre ses mains la vie d’une condamnée à mort.
Dans la deuxième partie de «Firmament», l’enchaînement de rebondissements et de révélations mélodramatiques est particulièrement soutenu. (Victor Tonelli/Théâtre du Rond Point)
publié le 12 janvier 2025 à 9h12

Sally Poppy est-elle vraiment enceinte ? Question vitale : la jeune domestique vient d’être condamnée pour l’atroce meurtre d’une enfant de 11 ans et «plaide le ventre». Si elle dit vrai, elle échappera à la pendaison pour être déportée. Le juge a constitué un jury de matrones pour statuer. Parmi ces douze femmes, Elizabeth Luke la sage-femme du village (Bénédicte Cerutti), Mary Middleton la simple (Elsa Agnès), Helen Ludlow, douze fausses couches en huit ans (Sélène Assaf) et Mrs Cary la femme du général (Anne-Lise Heimburger). Et au-dessus d’elles, il y a le ciel de l’Angleterre rurale de 1759, où l’on guette une comète dont un astronome du nom de Halley a prédit le passage.

Une Angleterre prévictorienne où les femmes ont une place bien subalterne – on se tue à la tâche domestique ou lors de ses accouchements –, mais où la parole n’est pas encore si corsetée qu’elle le sera au siècle suivant : entre elles (et sous le regard pantois de l’huissier de justice qui doit surveiller leurs délibérations) les femmes parlent de sexualité, de mamelons craquelés à force d’allaitements. Le corps féminin est au centre de ce huis clos judiciaire : celui de Sally Poppy (Andréa El Azan) qu’on examine et qu’on presse (sort-il du lait de ses seins ?), ceux des autres femmes, qu’elles se racontent. Leurs corps qui récurent, qui ramassent les poireaux, qui donnent vie.

Expressions imagées de l’Angleterre et gimmicks contemporains

Le Firmament est une pièce de l’anglaise Lucy Kirkwood, autrice remarquée, née en 1984 et passée par la compagnie fémini