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Libération
Nomination

Le metteur en scène Julien Gosselin nommé à la tête du théâtre de l’Odéon

Connu pour ses adaptations impressionnantes, l’artiste, nommé ce 21 juin par Emmanuel Macron, prend la succession de Stéphane Braunschweig. A la direction de la salle parisienne réputée difficile, il devra «garantir la polyvalence» du lieu, malgré un manque de moyens critiqué par son prédécesseur.
Julien Gosselin, à Paris, le 6 septembre 2016. (Julien Pebrel/Julien Pebrel / MYOP)
par Anne Diatkine et Rémi Guezodje
publié le 21 juin 2024 à 18h46

C’est donc bien lui, la rumeur était fondée, et on ne saurait s’en plaindre. Depuis plus d’un mois, elle donnait le metteur en scène Julien Gosselin prochain directeur du théâtre de l’Odéon-théâtre de l’Europe. On s’étonnait tout juste que le suspens s’étire. Le metteur en scène bien aimé dans ces pages, fondateur du collectif Si vous pouviez lécher mon cœur, et dont la dernière création, Extinctions, d’après Thomas Bernhard, Schnitzler et Hofmannsthal a été présentée au dernier festival d’Avignon, vient d’être nommé par le président de la République, ce 21 juin, à la direction du théâtre, sur proposition de la ministre de la Culture, Rachida Dati.

«Paradoxe des grands théâtres nationaux»

Il prend la suite de Stéphane Braunschweig, qui avait annoncé en décembre à Libération ne pas se présenter à sa propre succession, pour cause d’absence totale de marge artistique pour poursuivre son projet, lequel implique des créations, l’invitation de plusieurs spectacles étrangers, et des prises de risques, des découvertes. Une quadrature du cercle telle que tous les autres metteurs en scène approchés – Thomas Jolly, Thomas Ostermeier – ont décliné les avances qui leur étaient faites. Comment fera Julien Gosselin qui aurait accepté ce poste sans augmentation de budget ? A-t-il au bout du compte obtenu de la ministre de la Culture, très probablement éphémère, l’assurance que des moyens financiers viendraient à la rescousse ? A-t-il prévu d’engager des négociations pour modifier la convention collective très compliquée à réécrire au profit de la marge artistique ?

«Le paradoxe de ces grands théâtres nationaux est qu’ils sont en état de marche mais sans moyen pour l’artistique. Sans augmentation de la subvention, Julien prend un grand risque», analyse un artiste et ancien directeur d’une grande maison. La nomination de Gosselin, connu pour ses adaptations impressionnantes d’œuvres littéraires dont les Particules élémentaires de Houellebecq en 2013, et le roman-fleuve de Roberto Bolaño 2666 en 2016, interroge sur la stratégie qui pourrait être la sienne pour réussir à montrer des œuvres d’envergure internationale – les siennes et celles des autres – mais aussi les faire tourner dès lors que l’Odéon est producteur.

Programmation ouverte aux artistes du monde entier

Dans son communiqué, Rachida Dati confirme néanmoins que Julien Gosselin aura pour mission de garantir la polyvalence offerte par le théâtre de l’Odéon et les Ateliers Berthier, tout en proposant une programmation ouverte aux artistes du monde entier, des concerts et des conférences sur le site historique, ainsi que des temps forts de festivals. Julien Gosselin prendra ses fonctions au 15 juillet 2024. Il n’a auparavant jamais dirigé de théâtre. A la veille des législatives, il prend donc la tête de ce grand théâtre public réputé difficile dans un contexte politique incroyablement incertain. Devra-t-il en faire un lieu de résistance ?