Un rire tonitruant éclate derrière le rideau noir. Encantado, le spectacle que la chorégraphe brésilienne Lia Rodrigues lancera à Paris en décembre, est en gestation, à l’abri des regards. Interdit d’assister aux répétitions. Interdit de prendre des photos. «Je sais, je suis chiante», assume l’invitée d’honneur du Festival d’automne, qui lui consacre un portrait rétrospective de plusieurs pièces. Avant de justifier sur un ton plus bienveillant : «Quand on est en pleine création, on est très exposé.» Elle est arrivée, boucles brunes et port de reine, au Centre des arts qu’elle a fondé en 2009 avec l’association Redes da Maré. «Ici, c’est ma maison, ma vie, dit-elle. Je vis recluse dans la Maré.» Le hangar de 1200 mètres carrés se trouve à l’entrée de Nova Holanda, l’une des seize favelas de cet ensemble de 140 000 habitants que l’on appelle «la Maré». Lia Rodrigues y a installé la compagnie qu’elle a fondée il y a trente-et-un ans, ainsi que son école de danse.
«Le centre est un lieu très vivant, crucial pour la vie de la Maré», se félicite celle que tous appellent simplement «Lia». Il se passe ici beaucoup de choses au-delà de la danse. Réunions des associations de quartiers, débats sur la sécurité publique – un des principaux marqueurs des inégalités brésiliennes –, séminaires… Les murs témoignent de ce bouillonnement citoyen qui, dit Lia, «[la] nourrit». Ici, une affiche à la gloire du dramaturge Augusto Boal, père du théâtre