L’aube est encore loin d’avoir tiré sa première cartouche. Il est 4 heures du matin et Adélaïde de Clermont-Tonnerre se glisse derrière son établi. Elle fomente ses récits sous les toits, dans les limbes parisiens de ce beau duplex des quartiers agréables. Quand les mondanités qui font partie de ses fonctions la laissent en paix, elle s’écroule dès 22 heures. Commandant couche-tôt, elle abandonne son mari, passé par Europe 1 et LCI, en tête à tête avec le téléviseur. Tout cela pour émerger sans le secours de la moindre sonnerie et s’atteler à un travail de nuit qui l’épanouit. Elle dit : «J’ai un rapport joyeux à l’écriture.» Elle se refuse à l’affliction autant qu’à l’autofiction. Ses romans caracolent, ses pages volent au vent et ses intrigues sniffent une cocaïne féline. Elle s’est déjà attachée aux pas d’une ambitieuse ex-fille de madame Claude ou aux splendeurs et misères d’un self-made-man américain. Cette fois, elle raconte un trentenaire affectueux, confronté à la disparition prochaine de ses parents, couple fantasque de boomers et héros de cinéma. Dans la coulisse, on croise aussi les ombres de Weinstein, de Trump et de Poutine, tant son imagination la mène un peu partout. Pour avoir grandi avec Dumas, Balzac, Stendhal, elle aime se mettre dans la peau des autres. Et ce n’est pas seulement parce qu’enfant, on lui interdisait de dire «je». Normalienne accoutumée à Kant, Hegel ou Nietzsche, elle sait aussi tamiser l’air du temps. Elle s’interroge autant
Le portrait
Adélaïde de Clermont-Tonnerre : elle prend l’ascendance
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Adelaïde de Clermont-Tonnerre. (Jérôme Bonnet/Libération)
publié le 3 juin 2021 à 19h47
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