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Roman

Andrew McMillan, chant de mine

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Le cahier Livres de Libédossier
Dans son premier roman, «Pitié. Notes sur une ville», le poète met en scène trois générations d’hommes à Barnsley, dans le nord de l’Angleterre, entre labeur des mineurs et libération par le drag.
Andrew McMillan. (Sophie Davidson)
publié le 28 mars 2025 à 16h43

Peut-être certains romans doivent-ils s’apprivoiser au même titre qu’une ville, à la longue, par l’expérience, sans carte ni boussole. L’entrée dans Pitié d’Andrew McMillan, auteur né dans le Yorkshire en 1988 dont on a d’abord connu la poésie (le Corps des hommes, 2018), est par conséquent un peu rude : les chapitres sont courts, mais l’on ne sait ni très bien où nous sommes ni qui l’on suit. Nulle crainte, cette impression de désorientation se dissipera par la suite lorsqu’on aura identifié les protagonistes, Simon, Alex, Brian, Ryan, et que le texte donnera au lecteur le sentiment de davantage d’hospitalité, comme s’il fallait dans ce cadre devenir un familier des lieux pour s’entendre dire (moins de fragments, plus de clés) : désormais tu es des nôtres, maintenant tu es chez toi.

La ville en question s’appelle Barnsley, dans le nord de l’Angleterre, ancienne cité industrielle où la présence des mineurs résonne encore, ici en italique, pas lourd, tête baissée. «De plus en plus d’hommes sortent de chez eux en tombant comme des dominos, le visage bientôt noirci. Quelqu’un siffle ; un autre tousse.» Nous sommes avant la fermeture des mines de charbon et la mobilisation ouvrière de 1984 à laquelle Margaret Thatcher demeura sourde. En alternance, autre temps, autres mœurs : Simon, employé d’un call-center le jour et drag-queen la nuit, prépare un numéro plus politique que de coutume. Il compte revisiter l’histoire locale en se donnant le rôle de Thatcher (t