Il faut être familier du dépouillement pour définir le présent comme «une des rares choses dont nous ne puissions être séparés de notre vivant», qui «nous tient éternellement compagnie, croit-on». C’est ce que fait le narrateur d’Un passage vers le Nord dès la première phrase de ce deuxième roman d’Anuk Arudpragasam, «auteur sri-lankais de langue anglaise et d’origine tamoul», précise l’éditeur, né en 1988 et diplômé de philosophie de Columbia, à New York – et dont le premier roman, Un bref mariage, a été traduit chez Gallimard. Le passé manquant de présence saisissable, on risque cependant d’être perdu dans le présent, comme au réveil on peut avoir le sentiment d’avoir «été berné, spolié de tout ce temps, ce temps qui avec le recul paraît n’avoir rien contenu de substantiel, ni changement ni durée, ce temps advenu et passé, certes, mais qui ne nous a pour ainsi dire même pas effleurés». Le narrateur rentre au Sri Lanka après la guerre civile et ses atrocités et les trois parties du livre s’attachent à trois personnages. «Message» est conçu autour du coup de téléphone qu’il reçoit de la fille de la victime pour lui dire que Rani est morte, qui s’occupait de sa grand-mère. «Le voyage» raconte le trajet jusqu’au village où aura lieu la cérémonie et durant lequel il évoque Anjum qui vient de se remanifester et ave
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Anuk Arudpragasam et le temps qui «berne»
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Le cahier Livres de Libédossier
Anuk Arudpragasam. (Ruvin De Silva)
par Mathieu Lindon
publié le 8 janvier 2023 à 10h31
Enquête Libé
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