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Rapports de police

Entretien avec l’historienne Arlette Farge : «Au XVIIIe siècle, on venait aux Champs-Elysées pour se faire voir»

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Les récits d’un garde suisse chargé du maintien de l’ordre sur l’avenue parisienne à la veille de la Révolution montrent que ce lieu, propice aux larcins, permettait la rencontre entre aristocrates et gens du peuple. L’historienne Arlette Farge nous parle de ces documents qu’elle a découverts aux Archives nationales.
Vue des Champs-Elysées depuis le jardin des Tuileries, entre 1745 et 1775. (Alamy Stock Photo)
publié le 5 juin 2024 à 18h12

Les 417 rapports de Ferdinand de Federici sont passionnants parce qu’ils nous ramènent à la préhistoire de la (très mal nommée) plus belle avenue du monde, les Champs-Elysées. Ils nous racontent la société dans laquelle Federici est plongé, Paris à la veille de la Révolution, ce qu’il en comprend et ce qu’il en pense.

Federici, soldat de la garde suisse, est promu gardien des Champs-Elysées de 1777 à 1791. Il rend compte au colonel des gardes suisses, le comte d’Affry, et au comte d’Angiviller, directeur général des Bâtiments du roi. Ses 417 rapports hebdomadaires ont été trouvés aux Archives nationales, édités et préfacés par l’historienne Arlette Farge, spécialiste du XVIIIe siècle. Il y a de la maladresse dans ces textes écrits par un petit gradé, mais ils sont en même temps pleins de vie. Et, surtout, ils révèlent une personnalité très attachante, un qualificatif qu’on n’a pas souvent l’idée d’employer à propos d’un homme chargé du maintien de l’ordre.

A l’origine des Champs-Elysées, une décision de Louis XVI qui veut offrir une promenade aux Parisiens. Les marais malsains qui longent la Seine sont transformés en une avenue plantée d’arbres, la promenade va de l’actuelle place de la Concorde au rond-point des Champs-Elysées et se poursuit jusqu’à la place de l’Etoile. En largeur, elle s’étend de la Seine aux avenues Marigny et Matignon