C’est un homme moustachu au front dégarni, les yeux un peu tristes. François-Paul Alibert, né en 1873 et mort en 1953, a vécu une vie de poète reconnu, publiant des dizaines de recueils aux titres vaporeux comme la Prairie aux narcisses, la Guirlande lyrique ou le Cantique sur la colline. Aujourd’hui, plus personne ne les lit. Seules sa correspondance avec André Gide et une plaque, posée sur sa tombe par la ville de Carcassonne, où il est né, où il a travaillé en tant qu’employé de mairie, où il est mort, témoignent de la place qu’il occupait de son vivant dans le monde des lettres.
Il y a pourtant derrière le portrait officiel, les vers polis et la carrière exemplaire au sein des services municipaux de Carcassonne un autre Alibert. Un auteur qui frappe par l’audace de ses descriptions et la modernité de son propos. Un pornographe virtuose. Un romancier, enfin, qui a commis des livres aux titres bien moins mièvres : le Supplice d’une queue, le Fils de Loth et la Couronne de pines, roman qu’on croyait définitivement perdu et qui vient de sortir à l’issue d’une histoire éditoriale rocambolesque. Un véritable événement.
«Flots haletants»
Si la Couronne de pines a bien failli rester dans le cimetière des livres maudits, c’est qu’en 1934,