Menu
Libération
Histoire

Barbara Necek, l’esprit de carrière des gardiennes nazies

Article réservé aux abonnés
Le cahier Livres de Libédossier
La documentariste et journaliste retrace les itinéraires de surveillantes des camps nazis souvent noyées dans la masse anonyme.
Hermine Braunsteiner, au dernier procès de Majdanek achevé en 1981. (ZUMA Press/Alamy Stock Photo)
publié le 2 novembre 2022 à 23h53

Il ne fallait pas plus de huit à quinze jours pour que des filles ordinaires, issues le plus souvent du peuple, jusqu’alors douces et polies, se transforment en bourreaux, tel est le constat accablant sur la nature humaine soumise à un endoctrinement, dressé par l’ethnologue Germaine Tillion, déportée à Ravensbrück, camp de concentration pour femmes sur lequel règne, entre 1939 et 1942, Johanna Langefeld. Pourtant, l’endroit n’a pas encore adopté le fonctionnement qui sera bientôt le sien et lui vaudra le surnom de «l’enfer des femmes». Conformément au projet initial de rééducation, son aspect est alors accueillant, avec ses fleurs et ses paons, à la stupéfaction de la communiste allemande Margarete Buber-Neumann, lors de son arrivée le 2 août 1940. Outre cette éphémère spécificité – à laquelle met fin en novembre 1941 la visite du docteur Mennecke – le camp se singularise par sa fonction formatrice des gardiennes. De celles-ci, l’historiographie s’est peu préoccupée, le fascisme, idéologie viriliste, n’accordant aux femmes qu’un statut subalterne et, dans sa machine de guerre, les plaçant sous le contrôle des hommes – même s’ils ne pénètrent pas dans le camp. Elles ne possèdent pas de dossiers, contrairement aux SS, et n’ont laissé aucun écrit rédigé durant leurs années de service. Ainsi, elles se sont, majoritairement, noyées dans la masse anonyme des 4 000 gar