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Psychanalyse

Bernard Vernier, l’essence du prénom

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En se basant sur l’hypothèse de Stekel, l’anthropologue français démontre l’importance du prénom dans nos choix affectifs.
Peinture de Napoléon Ier (1769-1821) et Josephine de Beauharnais (1763-1814), appartenant au musée du Louvre. (Leemage. AFP)
publié le 8 décembre 2022 à 5h43

Il est très rare qu’un anthropologue s’intéresse de si près, textes en main, à la psychanalyse. Bernard Vernier est spécialiste depuis longtemps de la question des ressemblances dans la famille et plus largement, dans la parenté. Mais, dans ce livre, il va plus loin que dans ses observations de terrain : il a décidé de faire ressortir, statistiques à l’appui, la logique à laquelle obéit l’économie affective des sociétés qui utilisent les prénoms d’origine familiale. On est littéralement fasciné parce que Vernier appelle le «fétichisme onomastique» en amour. Stekel, contemporain de Freud avait déjà parlé du déterminisme du nom (1911). Quant à Groddeck, il avait écrit en 1916 : «On épouse la plupart du temps un prénom… […] A trois ans on a aimé un certain Hans et plus tard on épousera un Hans. Entre le premier et le dernier Hans, il y a toute une série de Hans.» Dans une lettre à Thomas Mann, Freud avait lui-même analysé le mariage de Napoléon qui s’est décidé à épouser Joséphine, une jeune veuve plus âgée que lui sur laquelle il avait transféré une partie du tendre attachement qu’il portait à son frère aîné Joseph (l’absence de descendance était la cause du divorce, on le sait).

Ce consensus des psychanalystes sur l’importance du nom montre que les faits concernés sont suffisamment fréquents pour être accessibles à l’intuition du sens commun. On pense ici aux deuxièmes unions ou la seconde épouse porte le même prénom que la première, ou au prénom de la mèr