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Libération
Beaux livres

Bruno Monsaingeon, tout sur la musique

Publication d’entretiens de l’homme de télévision et réalisateur qui fut proche du pianiste Glenn Gould.
Glenn Gould, en 1957 à Berlin. (Erich Lessing/AKG Images)
publié le 9 décembre 2023 à 3h41

Ceux qui aiment Glenn Gould l’associent évidemment à Bach, à l’essai de Michel Schneider Glenn Gould, Piano solo (Gallimard, 1988) et aux conversations qu’il a eues avec Bruno Monsaingeon et que celui-ci, réalisateur, a filmées. Un livre qui résulte de cent cinquante heures d’entretiens avec l’un de ses cousins, Guillaume Monsaingeon, permet de connaître cet homme de télévision, également violoniste. Deux interprètes ont compté dans sa vie : Menuhin, qu’il rencontre en 1962 (il était «le Rimbaud du violon» ), et Glenn Gould. Monsaingeon ressent son premier choc esthétique à 5 ans lorsque quelqu’un, chez lui, pose sur le gramophone la Danse hongroise en si mineur de Brahms, que «Menuhin avait enregistrée adolescent. Ce fut comme la révélation d’un paradis, quelque chose qui m’a remué pendant des jours, et qui continue d’ailleurs à me faire frémir».

Le pianiste lui écrivait des lettres fleuve

Monsaingeon se sent appelé vers le violon, qu’il commence vers 13 ans. Il s’exerce cinq à six heures par jour. N’étant pas un musicien virtuose, pour être certain de gagner sa vie en travaillant il passe des concours, apprend le russe et le bulgare et devient diplomate. Son premier poste l’envoie en Albanie. Il bifurque vers la réalisation de films à 25 ans. C’est le temps de l’ORTF. En 1971 il écrit à Gould qui lui répond cinq mois plus tard et l’invite à Toronto : «Cette entreprise avait quelque chose de complètement loufoque et d’utopique. Toujours est-il que je suis allé trouver Gould.» Monsaingeon a aussi été l’éditeur des textes de Gould, dont la qualité littéraire l’avait frappé. Le pianiste lui écrivait des lettres fleuve. Ensemble, ils discutaient des heures au téléphone, riaient beaucoup. Les souvenirs de Monsaingeon donneront des envies et de l’audace à ceux qui rêvent de rencontrer tel ou tel artiste ou de le devenir eux-mêmes ; ils y piocheront des idées de morceaux à écouter, tant il en cite. La musique, ce n’est pas comme la vie publique. Monsaingeon déclare, à propos des chefs d’orchestre : «La grande époque des chefs à vie et des dictateurs semble révolue.»

Bruno Monsaingeon avec Guillaume Monsaingeon, Filmer la musique. Entretiens (2008-2023) , Philharmonie de Paris, 336 pp., 28 €.