Menu
Libération
Librairie éphémère

«Cabdriver» de Dege Legg lu par Martin Guyo, étudiant

Article réservé aux abonnés
Chaque semaine, une lectrice ou un lecteur chronique un coup de cœur. Cette semaine, plongée dans le chaos nocturne de Lafayette, Louisiane.
«Chaque jour est un chef-d’œuvre, et je vais en peindre les moindres détails.» (Peter Marlow/Magnum Photos)
par Martin Guyo, étudiant en lettres modernes
publié le 7 janvier 2024 à 12h20

Seul dans une chambre d’hôtel miteux, Dege Legg évalue la situation. «J’ai quatre-vingt-un dollars en poche et pas de boulot.» Dans les petites annonces du journal, une compagnie de taxi cherche un chauffeur. C’est ce qu’il lui faut. Après un entretien d’embauche à l’esthétique d’un film de Scorsese, le voilà assigné au service de nuit. Et de ces courses où il sillonne les rues de Lafayette, en Louisiane, ravagées par la tempête Katrina, l’idée de ce livre lui vient. «Chaque jour est un chef-d’œuvre, et je vais en peindre les moindres détails.»

Dépouillé, insulté et parfois frappé, il subit la colère des passagers – rarement leur tendresse qui pourrait «recalibrer votre cœur». Il y a bien cette petite-fille accompagnée de sa mère en gueule de bois : «Te saoule pas, maman, ce soir. Bois juste du Coca.» Ou encore ce concierge partant dîner seul dans un restaurant. «Tout à coup, la mer s’écarte et tu entrevois spontanément l’âme d’un être humain dont le cœur est vierge de toute malice ou mesquinerie. C’est alors comme si quelqu’un avait allumé une ampoule dans un coin oublié de ton cœur.» Dans ce récit découpé en courts chapitres, Dege Legg – compositeur de <