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Il faut l’avoir vu déclamer ses poèmes et parfois même improviser, comme habité par une force bien plus grande que lui, pour saisir toute la puissance de Marc Alexandre Oho Bambe. Ce poète et slameur camerounais, qui vit en France et se fait appeler sur scène Capitaine Alexandre, nom de code de René Char durant la Résistance, vient de publier Souviens-toi de ne pas mourir sans avoir aimé (Calmann-Lévy), un objet littéraire hybride où se mêlent prose et poésie dans une mélopée si rythmée qu’à la lire on croirait presque l’entendre.

L’histoire d’un «nègre à moitié», comme l’appelaient ses grands-parents maternels qui n’avaient jamais pardonné que leur fille épouse «un homme de couleur» qui reçoit un jour dans sa boîte aux lettres un colis avec des cassettes audio, un disque, Mo’ Better Blues, et la photo d’un homme qui lui ressemble étrangement. Alors ce fou de jazz, passé à deux doigts de la mort pour cause d’overdose, décide de plonger dans son passé, son présent et peut-être même son avenir, pour comprendre. Et tout raconter à sa fille Indira, sa passion.

J’ai grandi comme je pouvais, avec tout ça, la rage au cœur en lambeaux, écartelé entre des injonctions contraires et des visions diamétralement opposées, des discours sur les races me réduisant à la douleur de ma peau, ma peau nègre marronne, ma peau-échappée, ma peau-sauvée par le jazz, musique dont le rythme et la liberté m’ont inscrit en moi-même et réconcilié. Grâce à la musique, à cette musique, je n’étais plus un bâtard café au lait, grâce à la musique, à cette musique j’allais découvrir qui j’étais, découvrir que j’étais.

Fils de.

Cyclones.

Et de.

Volcans.

Démiurge.

Créateur.

De beauté.

Et de magie.

Enfant de.

L’instant.

Free.

Comme le vent.