Toute personne stationnant un peu trop longtemps devant un écran de télévision s’est un jour ou l’autre fait ainsi interpeller : «Eh !, pousse-toi, tu n’es pas fille (ou fils) de vitrier». Anna, dans le premier roman de Clara Breteau, l’Avenue de verre, n’est pas fille de vitrier, mais de laveur de carreaux. C’est même, dans la ville de Tours, «le plus célèbre», à tel point que la Nouvelle République lui a consacré un article quand il est mort. Il avait un béret rouge (vert, parfois), transportait son échelle sur sa mobylette, et avait son quartier général à la brasserie l’Univers quand il n’était pas en train de manier mousse et raclette le long de l’avenue qui s’appelle, de son vrai nom, l’avenue Nationale. Le nom du père, disait l’article, on ne savait pas. On l’appelait simplement «Johnny».
A la suite de la nécrologie, un lecteur, qu’Anna ne parviendra pas à contacter, a déposé un commentaire sur Internet. «On l’appelait Johnny car, lorsqu’il est arrivé des Aurès en 1962, où son père harki a été massacré par le FLN algérien, il aimait Johnny Hallyday.» Le grand-père d’Anna, Hadj, harki ? Assassiné ? La jeune femme le savait guérisseur, il avait épousé en 1934 Fatima, laquelle est morte dans les années 2000, mais il n’y aura pas grand-chose à soutirer des archives. Quant au père, il n’a rien raconté.
«L’ombre rôdait toujours»
Le père d’Anna avait 17 ans lorsqu’il a débarqué en France avec son petit frère. Ils ont vécu un moment dans la rue. Puis il a trouvé sa plac