«Colette, pas à pas, fabrique “Colette”» : cette phrase de Martine Reid résume le dessein de son livre : tenant de la biographie et de la réflexion sur la place des femmes dans la littérature de la fin du XIXe et du début du XXe siècle, il met au jour la fabrication de l’écrivaine dont le nom de naissance était Sidonie-Gabrielle Colette. Elle s’est sculptée, à coups de changements successifs : «Dernière enfant de Jules et Sidonie Colette, petite-bourgeoise peu instruite née dans l’Yonne rurale» en 1873, elle meurt «auteure célèbre, à Paris», en 1954. Ses funérailles furent nationales. Professeure émérite de littérature française, Martine Reid donne une pluie d’informations, au point de parfois lâcher son fil directeur. Celui-ci fait songer au principe d’un autre livre : Racine, la stratégie du caméléon (1990), d’Alain Viala. S’inscrivant dans le sillage de Pierre Bourdieu, Viala soulignait la tactique de Racine pour occuper dans le champ littéraire du XVIIe siècle une place qui n’était pas prise, par Corneille notamment. Caméléon, le dramaturge changeait de peau pour être le seul de sa couleur. Sans utiliser le vocabulaire sociologique de Viala, Reid pointe chez Colette un mouvement incessant qui lui permet de se démarquer – des écrivaines, des maîtresses de son premier mari, des féministes, des lesbiennes. Colette avant Colette raconte ces métamorphoses. Ce «cheminement» d’une femme habitée «d’ambiguïtés profondes», qui va de
Biographie
«Colette avant Colette», une histoire de métamorphoses
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Colette vers 1910. (Henri Manuel/Alamy. ABACA)
publié le 13 décembre 2023 à 19h57
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