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Histoire

«Condamnées à mort» : après la guerre, l’archipel d’une épuration

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Fabien Lostec revient en détail sur le système de condamnation juridique et morale mis en place au sortir de la Seconde Guerre mondiale à l’encontre de centaines de Françaises collaboratrices.
46 femmes elles furent passées par les armes (121 en prenant en compte les tribunaux extralégaux). (Archives départementales Rhône, 394 W 341/2427)
publié le 6 juin 2024 à 2h00

Dans l’imaginaire collectif, la figure de la tondue résume le collaborationnisme féminin, postulé horizontal jusqu’au démenti apporté en 2000 par Fabrice Virgili (la France «virile», Payot). Derrière de précieuses statistiques judiciaires, ces travaux ignorent le vécu et le devenir de ces condamnées, se focalisant surtout sur la violence extralégale. Or, d’emblée Fabien Lostec révèle que ce sont des tribunaux légaux qui punirent de la peine capitale 650 accusées (dont deux tiers par contumace), poursuivies soit, essentiellement, pour délation, surtout à caractère politique – assimilée à des actes de trahison puisque, selon le code pénal, seuls les chefs d’inculpation de trahison et d’espionnage peuvent entraîner la mort –, soit pour collaboration policière avec l’occupant ou les partis collaborationnistes, et en dernier lieu, pour collaboration politique. Ces condamnées, majoritairement de jeunes citadines de moins de 30 ans à la profession leur assurant une proximité avec les Allemands, le sont moins pour avoir entretenu des relations amicales ou sexuelles avec eux que pour s’être mises à leur service et provoqué arrestations, tortures, déportation, décès. Néanmoins, leur collaboration les place dans l’ombre de celle des hommes et leur condamnation dans celle des «fusillés célèbres», tel Laval.

Désintérêt historiographique

Contrairement à l’idée reçue selon laquelle, conformément à un