Dans l’imaginaire collectif, les mœurs du Moyen Age sont prétendues barbares et sanguinaires, une idée reçue, battue en brèche, parmi d’autres, par cette magistrale étude. Didier Lett saisit, au plus près, les mentalités d’une société chrétienne dominée par «une sociabilité de l’agressivité». Il en décrypte avec rigueur, nuance et finesse le fonctionnement, imposé par des normes, des codes et des croyances, tel le lien entre honneur et violence jusqu’à la fin du XVe siècle, ou la position protectrice des hommes à l’égard des femmes dites fragiles. L’historien interroge sur quatre siècles la documentation relative aux crimes et châtiments, au prisme du genre, sans négliger aucune autre grille de lecture. Les sources, diverses et rares – entre 1 et 5 % de celles produites en fin de période ont été conservées, et ce à travers une «chaîne d’écritures» –, dessinent une «arène judiciaire», peuplée majoritairement d’hommes, accusés, victimes, témoins, défendeurs.
Les héritières de Lucrèce Borgia et Catherine de Médicis
Cette masculinité établit la graduation des actes incriminés : plus les délits sont graves, moins ils sont féminins. Les homicides sont commis essentiellement par et sur des hommes. D’où, sans doute, une commune représentation de femmes infanticides, parce que mères, ou empoisonneuses, car éternelles nourricières et héritières de Lucrèce Borgia o