C’est un peu comme si Gilles Deleuze quittait de nouveau la salle de cours. Sa voix s’est volontairement tue le 4 novembre 1995, mais elle restait vivante dans ses enregistrements. Ces captures sonores n’avaient jamais été transcrites jusque-là, le philosophe s’y était opposé. Les Editions de Minuit publient jeudi 5 octobre le premier volume de cette transmutation de l’oral à l’écrit, avec Sur la peinture, un cours prononcé de mars à juin 1981, dans une édition préparée par David Lapoujade, professeur à l’université Paris-I Panthéon-Sorbonne, qui avait déjà édité deux recueils de textes posthumes (l’Ile déserte et autres textes, 2002 ; Deux Régimes de fous, 2003). Cette entreprise a cela de particulier qu’elle nécessitait de partir d’une reproduction technique, ô combien précieuse car Gilles Deleuze ne rédigeait pas ses cours, à la différence de Michel Foucault par exemple. Et de nombreux auditeurs ont capté in vivo le cours légendaire hebdomadaire que Deleuze a tenu de 1970 à 1987 à l’université expérimentale de Vincennes, construite après Mai 68, puis de Saint-Denis à partir de 1980 quand la première fut rasée en trois jours par Chirac.
Tantôt bistro, tantôt comique, tantôt savant
Le philosophe s’était épanoui dans l’effervesce