Jacqueline est une couverture et Friedeward pareillement. Les deux étudiants est-allemands ont «une petite particularité» comme l’indiquera plus tard la Stasi au second, trouvant ainsi le moyen de le piéger : elle est lesbienne et lui gay. En ces années 50 à Leipzig, il est difficile de vivre sa sexualité comme on l’entend. Le paragraphe 175 du code pénal allemand édicté en 1871 (et aggravé pendant la période du IIIe Reich) est toujours en vigueur : les hommes homosexuels risquent jusqu’à cinq ans de prison. Mieux vaut donc se marier propose Friedeward à Jacqueline. Elle pourra continuer à vivre avec son grand amour, Herlinde, sans que celle-ci risque de perdre son poste à l’université. Et lui cessera de trembler quand il voit Wolfgang.
Désarrois de Christoph Hein développe un thème moins exploré que d’autres sur la société est-allemande. Sans lyrisme, comme on raconte après coup et de façon assez factuelle une histoire, il déploie la vie empêchée de Friedeward, ses espoirs, son envol, ses illusions perdues. C’est un roman qui baigne aussi dans le culte de la littérature germanique. Friedeward et Wolfgang se rapprochent, tout en lisant Tonio Kröger de Thomas Mann et les Désarrois de l’élève Torless de Musil, romans qui ne cachent pas les émois d’adolescents pour des camarades du même sexe.