Vingt ans, vingt-cinq ans après, comment envisage-t-on la jeune fille qu’on a été ? Emmanuelle Lambert, née en 1975, évoque à la troisième personne la stagiaire qui aimait «fouiller les boîtes d’archives» dans la cave de «l’Institut» vers 1998. Elle s’active à la photocopieuse lorsque «le Chef» – il ne sera jamais appelé autrement – apparaît pour lui demander ce qu’elle fait. «Elle avait répondu “Des photocopies”, il avait dit “Pour quoi faire”, et elle : “Pour faire des copies.” […] Il avait souri mais d’un seul côté, on aurait dit qu’il ne parvenait pas à s’amuser en entier : “N’oubliez pas de remettre les originaux à leur place.” Un temps. “Bien sûr que non, je préfère les perdre.” C’est comme ça qu’ils s’étaient rencontrés, avec le Chef.» Le titre du roman, Aucun Respect, ne fait pas référence à cette insolence, vaillante défense des tempéraments timides. C’est le naturel de sa relation avec Alain Robbe-Grillet qui attire à l’héroïne cette remarque amusée de la part du numéro 2 de l’Institut.
On aura reconnu la petite association devenue institution, l’Institut Mémoires de l’édition contemporaine (Imec) qui abrite désormais dans le Calvados, à l’Abbaye d’Ardennes, un riche fonds d’archives d’écrivains et d’éditeurs. L’étudiante refuse le contrat qu’on lui propose car, sérieuse, elle a un cursus en lettres à t