Harmoniser les horaires d’ouverture, numériser les systèmes d’emprunt ou fusionner certaines structures… Le plan «Lire à Paris 2025-2029», publié par la mairie de la capitale le 11 juin, énonce une série de mesures visant à repenser le fonctionnement de toutes les bibliothèques de la ville, et doit désormais être validé par le Conseil de Paris. Seulement, ses orientations inquiètent les syndicats, qui y voient des logiques d’optimisation budgétaires alors qu’ils alertent déjà depuis des mois sur une précarisation croissante de leurs emplois et missions.
Pourtant, le montant alloué aux bibliothèques et médiathèques parisiennes cette année est supérieur à celui de l’an passé – 4,4 millions d’euros en 2025, contre 4,3 millions en 2024 – dans le budget primitif. Mais celui-ci «risque fortement d’être revu à la baisse, souligne Guillaume Floris, représentant syndical du Supap-FSU (Syndicat unitaire des personnels des administrations parisiennes). On nous demande déjà de réduire nos commandes de livres".
Dans un communiqué publié dans la foulée, le Supap-FSU, la CGT et FO dénoncent un plan qui, sous couvert d’harmonisation et de «bon sens», risque de nuire à l’autonomie des équipes et à la diversité de l’offre culturelle. Ils annoncent une grève ce vendredi 20 juin, puis une seconde, le 1er juillet.
Mutualiser et fusionner
Le plan Lire à Paris 2 (Plap2) avance la nécessité d’harmoniser le réseau de la capitale, qui se compose de 57 bibliothèques de prêt et de 15 bibliothèques patrimoniales et spécialisées. Pour ce faire, il évoque la possibilité d’imposer à toutes les structures les mêmes horaires d’ouverture, ce que fustigent les syndicats, qui souhaitent que chaque bibliothèque puisse adapter ses horaires aux spécificités de son territoire et de ses publics. Surtout, «lorsque les bibliothèques sont fermées, le personnel travaille quand même», rappelle Guillaume Floris.
Féminisme
Derrière les portes closes, celui-ci prépare des partenariats, des animations, accueille du public scolaire et périscolaire, fait du portage (en apportant des livres au domicile d’usagers incapables de se déplacer). «Si l’on ouvre plus, ce sera du temps en moins pour d’autres publics», poursuit-il. Le plan suggère également «d’adosser les plus petites d’entre elles à une grande bibliothèque à proximité». Interrogée par les syndicats, la ville précise qu’il s’agit d’une fusion administrative au sein de structures plus grandes dans une logique de mutualisation des effectifs.
«Des petites structures n’ont que quatre ou cinq collègues, ce qui provoque une certaine fragilité, dès lors que certains s’absentent», reconnaît Guillaume Floris, qui estime toutefois que la solution proposée est inadaptée : «Cela permettrait d’avoir moins de perturbations, mais en même temps, supprimerait l’existence d’une équipe qui connaît bien son quartier, et développe une offre adaptée à celui-ci.» Il faut plutôt ouvrir des postes, martèle l’intersyndicale dans son communiqué.
Rénovation insuffisante
Les syndicats déplorent également l’absence d’un vrai plan de rénovation structurelle pour ces bibliothèques parfois «mal isolées, avec un système de ventilation en berne ou un ascenseur en panne». Cet hiver, «il faisait 10 °C dans le hall d’accueil de la bibliothèque Françoise-Sagan», cite en exemple Guillaume Floris.
En matière de rénovation, la ville de Paris songe surtout à la transition écologique, envisage le passage aux LED, à l’installation de panneaux photovoltaïques... Pour le confort thermique des salariés et usagers, elle suggère de mettre en place des «dispositifs limitant l’impact des fortes chaleurs extérieures dans les bâtiments», de laisser les fenêtres ouvertes la nuit grâce à des dispositifs anti-intrusion, ou de sensibiliser les agents aux bonnes pratiques pour maintenir une température correcte. Des mesures jugées insuffisantes par les syndicats.
Des mesures peu écolos
Le communiqué de l’intersyndicale est émaillé d’autres points de tensions, dont la proposition de la ville de supprimer la plastification des ouvrages dans un but écolo, ou encore de numériser massivement les films et musiques – pour progressivement réduire les collections de CD et DVD.
Deux projets que les syndicats jugent, dans le fond, peu écologiques. Car «plastifier permet plutôt d’augmenter la durée de vie des livres», souligne Guillaume Floris. Quant au streaming, il «est aussi très consommateur en énergie». Les syndicats espèrent que leurs revendications seront entendues par le Conseil de Paris, qui devrait commencer à évaluer le Plap2 le 1er juillet.