«L’univers est infini, mais pas illimité, il est cerné.» Seul une nuit, dans une maison isolée au bout du monde (presqu’île de Crozon, Finistère), le poète est réveillé par les vagues. Passé un instant de frayeur, nourri par le sentiment de sa fragilité, il médite sur la lune, les marées : «Je prends conscience de l’ampleur cosmique du phénomène auquel j’assiste.» Les êtres humains n’ont-ils pas le «privilège de voir, de savoir et de dire» ? Les mots ont des majuscules. Ce sont les balises de l’existence, laquelle sous-entend «une Puissance créatrice» : le Cosmos, la Vie, l’Etre, bien sûr la Mort, et le Mal rencontré une première fois dès 1937, avec l’occupation japonaise. François Cheng, né en 1929, résume ici son parcours, la manière dont il a assimilé deux cultures. A l’âge de 19 ans, emmené par son père à Paris, il y reste, cependant que toute la famille s’exile aux Etats-Unis. Orphée, découvert avec Rilke, devient le guide, «la figure symbolique d’un chant qui, par-delà la mort, unit les âmes aimantes et aimantantes». La maison du cap de la Chèvre a été prêtée par une lectrice : «Ainsi, les écrits nés de ma nuit ont suscité une rencontre de cœur à cœur qui rompt, jusqu’à un certain degré, ma réclusion forcée face aux épreuves du grand âge.» Cl. D.

Assise sur le fauteuil capitonné vert émeraude près du lit de sa mère, l’autrice l’écoute exaspérée. Sa mère autrefois lumineuse et révérée enfant, ne cesse de se plaindre. «S