Un homme, Bart, quitte tout pour s’installer dans un faux plafond du Tribunal de Paris. Chaque jour, il devient le «témoin» d’audiences qu’il choisit selon les chambres et les cas : des violences ordinaires aux «infractions liées au terrorisme». Si le prétexte est fantastique, le récit enchaîne les procès de façon réaliste : «Sa main tapote nerveusement la barre. La juge l’observe maintenant par-dessus ses lunettes, outrant une moue de dédain.» Bart s’aperçoit assez vite que la plupart des prévenus sont jugés pour ce qu’ils sont plutôt que pour ce qu’ils ont fait, «appartenant à cette catégorie désignée pour la répression». Dès lors, se dit-il, «si nous jugeons ce qui nous heurte, nous disconvient, il serait juste de requalifier le jugement en aversion, en colère». Une variation contemporaine sur Témoignage (1934) de Charles Reznikoff, avec un peu de Kafka et Melville à la fin. É.L.

Second roman d’un jeune romancier et essayiste, Un si beau bleu se déroule à la frontière des Alpes italiennes et suisses. Là s’élève, proprement pyramidal et baigné de légendes, le mont Cervin (4 478 m). S’il est pour les uns la performance à ajouter à son profil sur les réseaux sociaux, pour Florian, le narrateur, c’est la confrontation suprême avec son double et ses démons. L’épreuve absolue du vide et de la mort possible. Angoissé et maladroit, Florian raconte avec autodérision cette quête vers lui-même et les autres. Il fera douloureusement ses