«Je n’aime pas la forêt. Ici tu fais deux cents mètres et elle t’enferme», explique Koda, un Libanais que rencontre Patrick de Saint-Exupéry dans une de ces villes, isolées comme une île, au cœur de l’océan vert qu’incarne désormais l’actuelle république démocratique du Congo (RDC). Autrefois baptisé Zaïre, voici un pays, grand comme l’Europe de l’Ouest, qui ressemble à une cathédrale en ruine. On s’y enfonce comme dans «une mousse» selon l’expression d’un Congolais croisé par l’auteur à Goma, autre ville située à la périphérie de cet obscur empire, ex-colonie belge, où peu d’Occidentaux osent pénétrer. Sur la carte, on ne distingue qu’«une immense tache verte, la forêt équatoriale, parcourue par un fleuve sinueux de 4 700 km», avec «de supposées routes, figurées par un cartographe optimiste ou esthète», précise le journaliste. Un temps grand reporter au Figaro avant de fonder la revue XXI, Patrick de Saint-Exupéry s’est embarqué dans la «traversée» épique de cette forêt sans fin, pour nous offrir un incroyable récit d’aventure.
On le suit pas à pas, en hélicoptère, mais aussi à moto sur «les vestiges d’une route qui fut taillée en tunnel». Puis dans un train poussif, encore en usage grâce à l’ingéniosité opiniâtre de quelques employés, peu ou pas payés. Ou encore sur une barge, qui descend le fleuve Congo avec une lenteur désespérante et finit par évoquer une arche de Noé, voire le Radeau de la Méduse, selon qu’o