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Libération
Roman

Florence Seyvos, huissier et huis clos

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Le cahier Livres de Libédossier
Deux sœurs sous la férule d’un beau-père dans «Un perdant magnifique».
Florence Seyvos, chez elle à Paris, le 12 novembre. (Patrice Normand/Editions de l'Olivier)
publié le 3 janvier 2025 à 16h16

La romancière Florence Seyvos traduit roman après roman son intelligence des enfants. Elle enregistre leurs intuitions, leur perspicacité, la peur et les silences qui les constituent : «Nous ne parlions pas du fait que nous avions le sentiment de vivre avec un fou.» En discuter aurait été s’infliger une double peine. Anna et Irène rient, observent, négocient les virages. Dans les années 1980, ces sœurs ont vécu pendant six ans, par intermittence, avec le second mari de leur mère. C’est lui le fou ; Jacques. Un perdant magnifique, à travers Anna, qui raconte ses souvenirs quarante ans plus tard, dresse de cet homme un portrait qui lui conserve ses défauts et son grand charme. Le tableau fonctionne comme une constellation : il illumine la mère des filles, qui a bien du courage ; le père des filles, qui reste bien discret, et les filles elles-mêmes, solidaires, mûres, raisonnables et drôles.

Jacques est un entrepreneur qui essaie de faire des affaires en Côte d’Ivoire avec des machines agricoles. Son entreprise ne marche pas. Il met ses échecs sur le dos de la conjoncture alors qu’ils semblent résulter de sa personnalité, flamboyante et irresponsable. Jacques est ancré dans les années 1970 et 1980. Il pourrait à l’écran avoir les traits de Jean-Paul Belmondo, lorsque la gaieté surjouée de l’acteur cache un problème et des mensonges. La mère d’Anna et