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Essai

Fort Huachuca, fabrique de GI noirs par temps de ségrégation

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Le cahier Livres de Libédossier
L’historienne Pauline Peretz consacre une étude subtile au camp d’entraînement installé dans l’Arizona un peu avant l’entrée des Etats-Unis dans la Seconde Guerre mondiale.
Soldats de la 93e division d’infanterie américaine, formé d’Afro-Américains, à Fort Huachuca, en 1942. (Corbis. Getty Images)
publié le 19 mai 2022 à 6h00

L’actualité du XXIe siècle rappelle que le racisme n’a pas, tant s’en faut, disparu des Etats-Unis. Pourtant, la Seconde Guerre mondiale sembla ouvrir une ère nouvelle. Lorsqu’il instaura la conscription, en 1940, le président Roosevelt promit, en effet, que les Noirs serviraient à hauteur de leur poids démographique – 10 % – dans les forces armées, et ce dans toutes les branches. L’horizon se dégageait : en servant fidèlement leur pays, les Afro-Américains remporteraient une double victoire – contre le nazisme d’abord, contre la ségrégation de l’autre puisqu’ils seraient récompensés de leur engagement patriotique. Restait à entraîner les deux divisions amenées à combattre en Europe et dans le Pacifique. A cette fin, l’état-major installa à Fort Huachaca, dans les étendues désolées de l’Arizona, un immense camp destiné à aguerrir les troupes des 92e et 93e divisions d’infanterie. Rien ne garantissait, toutefois, que le pari lancé avant même Pearl Harbor serait remporté, comme le montre l’étude subtile que l’historienne Pauline Peretz consacre à ce lieu assurément oublié.

La part belle aux artistes noirs

L’US Army vivait alors sous le régime de la ségrégation qui laissait, cependant, une large marge d’interprétation aux officiers chargés de l’appliquer. De ce point de vue, Fort Huachaca se présente comme un cas d’école. Son commandant, le colonel Edwin Hardy, s’efforça d’aménager la séparation, en s’adressant courtoisement à ses subordonnés et en s’efforçant de valoriser, via le biais d’équipements modernes e