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Ses romans noirs sont attendus avec de plus en plus d’impatience tant Hervé Le Corre s’est imposé comme un maître du genre en France, capable de situer ses intrigues aussi bien au temps de la Commune (Dans l’ombre du brasier, Rivages noir, 2019) que de nos jours chez les femmes et les hommes qui souffrent de solitude, de misère ou d’emprise (Traverser la nuit, Rivages noir, 2021) et jusque dans l’au-delà avec l’Eternité (suite et fin) (
Autrement, 2022). Son nouveau livre, Qui après nous vivrez, sera publié le 10 janvier par Rivages noir. Nous n’avons pas eu la patience d’attendre de l’avoir en mains pour savoir de quoi il retournait.
D’où vient ce drôle de titre ?
Il est décalqué d’un poème de François Villon, la Ballade des pendus, un texte sublime. «Frères humains, qui après nous vivez /N’ayez les cœurs contre nous endurcis, /Car si pitié de nous pauvres avez, /Dieu en aura plus tôt de vous merci. […].» Je l’ai conjugué au futur car mon roman est une uchronie.
Quelle en est l’histoire ?
Cela démarre à la moitié du XXIe siècle dans une ville où soudain tout s’éteint. Un jeune couple, qui vient d’avoir un bébé, pense qu’il s’agit d’une panne classique sauf que l’électricité ne revient pas. On passe ensuite à 2120 où une famille essaie de survivre dans un monde dévasté. Et, entre ces deux dates, on suit des générations de femmes qui vont se transmettre des valeurs d’humanité et de résistance face aux prédateurs et aux sales engeances qui se déchaînent. Parmi elles, il y a le bébé du début, Alice, qui va elle-même avoir une fille.
C’est un roman noir résolument féministe ?
Pour moi, c’était instinctif, seules des femmes peuvent transmettre cette humanité, cette pulsion de vie. Elles voient l’humanité s’autodétruire mais elles refusent d’être de simples victimes, elles se battent, elles manient les armes, elles enseignent à leurs filles comment résister. Elles voient passer des convois militaires d’où tombent des petits papiers qui sont autant d’appels au secours. J’y ai mis toute la hantise de ce que le XXe siècle a fait et de ce que le XXIe siècle nous prépare.
D’où vient l’effondrement de la société ? Du climat, de la politique, du social ?
De tout ça mélangé. Mon roman met en scène une société ultra-autoritaire où les pauvres sont dans des quartiers de relégation et où les aides sociales sont données en fonction de certaines conditions, et notamment de leur hygiène de vie. Un de mes personnages est un contrôleur social qui méprise tous ces gens qui viennent lui quémander de l’aide. Et en même temps des pandémies se déclarent et la forêt est détruite par le feu. Mon idée était de faire en sorte qu’on y croie, que ce soit vraisemblable.