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Histoire

Isabeau de Bavière, parce qu’elle le Valois bien

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L’épouse de Charles VI, reine comparée à Médée, cristallisa toutes les haines. Christine Rérat-Maintigneux interroge cette singularité.
Isabeau de Bavière, peinture anonyme accrochée dans la «galerie des Illustres», au château de Beauregard (Loir-et-Cher). (peintre non identifié/Manuel Cohen/ Aurimages)
publié le 17 août 2023 à 5h57

Si, depuis un demi-siècle, l’histoire des femmes a sorti des vies de l’ombre, Alain Corbin rappelle que celles qui furent détestées ont, elles, évité cette «chute mémorielle», par leur évocation en groupes : sorcières, pétroleuses, collaboratrices et autres tondues de la Libération. C’est ainsi oublier l’exécration subie par Isabeau de Bavière, l’épouse de Charles VI, jusqu’au renouvellement de l’historiographie dans le second XXe siècle, réformant l’enseignement et ses manuels, vecteurs de cette haine à l’égard d’une femme. Cet ouvrage interroge, avec brio, cette singularité : tout comme Jeanne d‘Arc, dont elle est le pendant négatif, l’inscription dans l’imaginaire collectif de la figure d’Isabeau – mauvaise épouse, adultère, négligeant son mari malade, mauvaise mère, trahissant son fils au profit des Anglais, et donc mauvaise reine, traître à la nation car étrangère – a une finalité politique. L’historienne analyse la construction de cette figure fictionnelle, tout en cherchant à retrouver la vraie Isabeau, dès son mariage à 15 ans, en 1385.

Violence folle de son conjoint

Les crises de folie du roi la propulsent, épisodiquement, en régente. Inexpérimentée, elle abandonne le pouvoir au duc d’Orléans. On lui prête dès lors amoralité et dépenses somptuaires en détournant les impôts. Silence sur sa vie d’épouse confrontée à la violence folle de son conjoint, dont elle a déjà 12 enfants à 30 ans (peu survivront). L’autrice nous plonge dans les rivalités et les guerres qui opposent Armagnacs et Bourgui