Le Conquérant commence par un événement ordinaire : dans les rues d’Oslo, une nuit, un taxi ramène un homme célèbre chez lui. La jeune conductrice a reconnu Jonas Wergeland, une star adulée de la télé. Mais elle comprend rapidement que le réalisateur se trouve sous l’empire de l’alcool et de la haine. Il dit avoir tué un homme à coups de pied, tout en vomissant dans l’habitacle. Ses derniers mots, quand les secours arrivent, sont : «Bon Dieu, tu sais que tu as de beaux seins !» La taxi woman racontera plus tard avoir cru qu’il allait la violer. Longtemps, cette scène inaugurale poursuit le lecteur. A quoi sert-elle ? A montrer sans doute l’effondrement de l’idole dans le caniveau, comme dans l’esprit des Norvégiens. «Elle pleurait, car elle avait vu une chose précieuse, une chose à laquelle elle tenait sincèrement, voler en éclats.»
Attente de son procès
Un an après l’incident, en 1992, Jonas Wergeland est accusé d’avoir assassiné la femme de sa vie, Margrete Boeck. Proie de médias hystériques, il se mure dans le silence dans l’attente de son procès. Le narrateur, un professeur d’histoire devenu biographe à succès, a été sollicité par un éditeur pour écrire «la biographie définitive de Jonas Wergeland». En chercheur scrupuleux, il a accumulé tellement de documents, qu’il pourrait ne serait-ce qu’écrire vingt pages sur le rapport de son personnage avec le tweed. Arrive alors chez lui une mystérieuse femme en noir, presque providentielle, qui vient lui raconter les