En avril 1874, un vétéran sudiste odieux conduit une carriole avec une jeune femme muette depuis des mois et sa fille de 12 ans ConaLee vers l’asile d’aliénés de Weston. C’est la scène inaugurale des Sentinelles, sixième roman de la rare Jayne Anne Phillips, avec lequel elle a été récompensée du Pulitzer. Le lecteur ne sait pas que cette équipée annonce la fin des ennuis pour les deux femmes. On le ramène alors dix ans auparavant, en pleine guerre de Sécession. Deux amoureux fuient une plantation et la cruauté du maître, en compagnie de Dearbhla, une guérisseuse d’origine irlandaise, pour trouver refuge dans les montagnes isolées de la Virginie occidentale. Lui s’engage bientôt comme volontaire du côté des unionistes, Eliza, elle, survit armes au poing pour protéger leur fille née après son départ. Tous deux vont être violemment brutalisés par les événements. De passage à Paris, Jane Anne Phillips commente la ligne sinusoïdale qui va du haut en bas sur la couverture de son livre en français : «Je veux que le lecteur ait l’impression d’être engagé dans ce long voyage, à travers la guerre et ces traumatismes, et qu’il en ressente la profondeur, la perte, la force et la débrouillardise. Alors il comprendra pourquoi ils sont tels qu’ils apparaissent lorsque vous les rencontrez pour la première fois.» Entretien.
Avez-vous travaillé longtemps sur les Sentinelles ?
Au moins huit ans. J’ai beaucoup lu sur la guerre civile pour trouver la batai