«Passant en quelques secondes de l’optimisme le plus vrai à une sorte de neurasthénie prophétique, il a eu cette formule à vous glacer les os : “Je suis de moins en moins réel. C’est atroce.” Un fulgurant éclair de compréhension semblait le traverser.» Le Roitelet est cependant un livre serein. Le narrateur est un écrivain qui ressemble à l’auteur, Jean-François Beauchemin étant né au Québec en 1960 et ayant publié bon nombre de textes, dont le Jour des corneilles en 2004. Dans le Roitelet, récit de vie à la campagne, tout serait paisible si, dès le premier des soixante-trois très brefs chapitres, le narrateur alors âgé de 15 ans et son cadet de deux ans n’avaient dû procéder à l’accouchement d’une vache. Cet événement a eu des conséquences sur le plus jeune adolescent, «mon frère», ainsi qu’il sera dénommé tout au long du texte. Du vivant des parents, déjà, «mon frère» refusait «de sortir de sa chambre» et «mon père avait enlevé la porte» en déclarant : «J’enlèverai s’il le faut toutes les portes de cette maison ! Dieu du ciel ! Tant que je vivrai, personne ne s’enfermera chez moi !» Et ç’avait été efficace. Une minute après le retrait de la porte, le frère «est sorti très docilement de sa chambre. “Parfois, a-t-il dit en passant devant nous, les choses sont d’une horrible simplicité”». La phrase suivante, qui ouvre le chapitre six, est : «Ensuite pas mal d’années ont passé, puis mes parents sont mort
Comment ça s'écrit
Jean-François Beauchemin, pierre, feuille, schizo
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Le cahier Livres de Libédossier
«Pourquoi Dieu ne m’aime-t-il pas ? Après tout, c’est son métier d’aimer les gens ?» demande le frère schizophrène. (Niko Guido/Getty Images)
par Mathieu Lindon
publié le 22 janvier 2023 à 7h07
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