Le premier roman d’Hugo Lindenberg, Un jour ce sera vide (Christian Bourgois, prix du livre Inter 2021) était mystérieux comme l’enfance. La Nuit imaginaire jette au contraire une lumière crue sur l’énergique dérive d’un garçon de 21 ans. Il s’agit du même personnage. Il avait 6 ans quand sa mère est morte. Il a vécu quinze ans sans rien savoir réellement. Le livre s’ouvre au jardin du Luxembourg, décor d’une promenade rituelle avec sa tante. Pour une fois, la chape de silence est soulevée, elle lui apprend ce qui s’est passé. Ce n’était pas un accident. Gare de Lyon, ««la nuit du changement d’heure»», elle a «“avalé des barbituriques et s’est couchée sur la voie”, a dit ma tante dans une tempête immobile d’arbres morcelés».
Une deuxième révélation permet au narrateur d’enquêter un peu. Un matin, une photo tombe d’un exemplaire de l’Interprétation du rêve qu’il a machinalement pris dans sa bibliothèque : sa mère et deux amies, «Mirabel, juin 1976. L’Autre Groupe.» Il possède seize photos de sa mère. «Ce sont les miennes, reliques héritées d’on ne sait qui puisque d’elle tout était banni chez moi.