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«La Ville d’après»: Detroit, rongée des voitures

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Le cahier Livres de Libédossier
L’essai passionnant de Raphaëlle Guidée plonge au cœur de la ville dont la crise perpétuelle depuis 2008 révèle l’endurance du capitalisme autant qu’elle dessine la possibilité de sa fin.
Bank, United Artists Building, Detroit, 2005. (Yves Marchand et Romain Meffre)
publié le 18 décembre 2024 à 20h36

Detroit a toujours fasciné. Capitale mondiale de l’automobile, «Motor City», ses usines gigantesques et sa population d’ouvriers venus de partout aux Etats-Unis, incarna au XXe siècle une certaine idée du rêve américain. L’avenir fantasmé d’un pays prospère. «Detroit aujourd’hui, c’est votre ville de demain», déclara dans une formule célèbre Coleman Young, premier maire noir de la ville (1974-1994). La phrase apparaît en exergue de la Ville d’après. Detroit, une enquête narrative, de Raphaëlle Guidée. Maîtresse de conférences en littérature comparée à l’université de Poitiers, l’autrice a comme spécialité la représentation des catastrophes (notamment dans l’art et la littérature), les conséquences des crises financières et les liens entre crise, apocalypse et utopie. Ce qui est idéal pour comprendre Detroit. Depuis la crise des subprimes de 2008, l’idéal urbain et social que Detroit incarnait autrefois s’est transformé en cauchemar aux allures de fin du monde. Délaissée par l’industrie et les constructeurs automobiles, abandonnée par une municipalité qui dut déposer le bilan, la ville s’est alors transformée en paysage de ruines et de désolation. Selon le dernier recensement officiel de 2022, le tiers d’une population très majoritairement afro-américaine (sept noirs pour un hispanophone ou un blanc) et 40% des enfants vivent, aujourd’h