Qu’est-ce que le déni quand il s’installe ? Le «maquillage du désastre» ? Ou bien «une noble qualité, à savoir la capacité de mesurer les avantages d’une situation» lorsque celle-ci laisse à désirer ? C’est le genre de question que pose cet élégant roman. Au bout de sept ans de mariage, un mari aimant apprend à sa femme qu’il est homosexuel. Un homme, puis un autre s’installent dans leur vie commune, jusqu’à ce qu’un amant plus jeune change la donne. Ce n’est pas lui «le Bel Obscur» du titre. Il s’appelait Edmond, la famille l’avait gommé de l’arbre généalogique. Il était liégeois, ingénieur des Mines, il est mort à 30 ans dans un hôtel d’Orléans, en 1865. Un médium, une graphologue sont consultés, cependant que la narratrice exhume ses propres archives, les cahiers où elle se confiait naguère. Concernant Edmond, elle dispose de deux photos et d’un brouillon de lettre pour comprendre qui il était et pourquoi il a fait de la peine à sa mère. Claire Devarrieux
Les premiers chapitres du «Bel Obscur» de Caroline Lamarche
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J’arracherai le buddleia. Sa beauté trompeuse a régné trop longtemps. Malgré son parfum et l’éclat de ses fleurs, ses feuilles renferment une molécule toxique pour les chenilles, il prend la place d’autres espèces, bref, c’est une plante invasive. Il est vrai que ce qui fut autrefois notre jardin, à Vincent et moi, est à ce point délaissé que la vigueur du buddleia constitue une prouesse. Longtemps je me suis réjouie de sa résistance là où les autres plantes sont envahies de liserons ou