La lecture du sommaire est à elle seule une plongée dans l’univers de l’enfermement. «Frontière frictionnelle», «dilution des limites», «désorientation et morcellement»… Ses réflexions autour de l’espace et de la frontière en Palestine ont mené Stéphanie Latte Abdallah aux portes de la prison. «J’étais baignée par les récits avant même de demander une quelconque autorisation à l’administration pénitentiaire», raconte celle qui vient de publier une somme qui fera date – 466 pages, le projet de traduction en anglais est en cours – sur l’histoire de l’enfermement en Palestine.
Depuis la publication, en 2005, de sa thèse sur les «destins de femme et les liens familiaux dans les camps de réfugiés palestiniens en Jordanie 1948-2001», Stéphanie Latte Abdallah n’a de cesse de revenir en Palestine pour valoriser les faits dans un conflit où, comme elle dit, «tout le monde se sent d’avoir un point de vue». Selon elle, la Palestine est un territoire sans frontières qui raconte un «dehors» (les territoires occupés) dont le pendant s’organise «dedans» (le système carcéral). Au cours de son travail sur la frontière, qu’elle soit physique ou non, une évidence ethnographique s’impose : si depuis 1967, 40 % des hommes palestiniens sont passés par la prison, il existe une forme de gouvernance par l’enfermement.
«La possibilité d’être arrêté est permanente»
L’imprégnation, pour celle qui parle arabe et vit à Jérusalem une bonne partie de son temps, sous-tend sa démarche ethnographique. Son ouvrage n