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Essai

«Le Sexe interdit», il avance et il recule

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Consentement au Moyen Age, négation par l’Eglise, pathologisation des pratiques dites déviantes… Fanny Bugnon et Pierre Fournié présentent des archives policières et judiciaires qui montrent une histoire de la sexualité des Français loin d’être linéaire.
«Pan et Selene» de Hans von Aachen (1552-1616). (Bridgeman Images)
publié le 9 février 2023 à 10h38

«Il descendit et la laissa toute mouillée dedans et hors sa nature», ainsi Marguerite Guillème décrit-elle, devant le tribunal de Dijon le 22 mai 1449, le viol qu’elle a subi, «la nuit venue», allongée «en une couchette en la chambre dudit Ravel où elle [avait] coutume de se coucher». «Est-il permis de provoquer manuellement chez sa femme une excitation et d’en provoquer sur soi-même ?» demande, cinq siècles plus tard, un catholique à l’Abbé Viollet…

Paroles oubliées, si ce n’est des spécialistes de l’histoire de l’intime, débutée dans la décennie 1970, celle de l’après Mai 68, qui proposait de «jouir sans entrave», et du Mouvement de libération des femmes (MLF), qui répondait aux militants d’extrême gauche : «Votre révolution sexuelle n’est pas la nôtre.» Paroles retrouvées par Fanny Bugnon et Pierre Fournié, dans les fonds de la justice civile ou pénale, de la police chargée de contrôler les mœurs, de la censure des images et des écrits dits licencieux, car «les traces de la sexualité sont partout». Paroles livrées ici, à l’état brut, sous forme de fac-similés, rendues intelligibles à un public non averti par leur retranscription partielle. Elle permet à chacun de s’emparer des soixante-dix pièces d’archives, produites jusqu’aux années 30