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«Le Voyant d’Etampes»: Abel Quentin et la mélodie du boomer

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Librairie éphémèredossier
Chaque semaine, une lectrice ou un lecteur chronique un coup de cœur littéraire.
Abel Quentin, à Paris, le 14 octobre 2021. (Louise Carrasco/Libération)
par Alexandre Blain, Responsable web d'une plateforme de VOD
publié le 26 février 2022 à 17h03

«J’écoutais, partagé entre l’effroi et l’admiration pour cette génération aux colères définitives.» Ce sont à peu près ces deux émotions qui vont habiter Jean Roscoff et son regard sur la génération de Léonie, sa fille. Elle, malgré toute la tendresse qu’elle lui porte, voit avant tout en lui ce sexagénaire à l’ethos de mâle blanc, cis, hétéronormé. Lui, malgré son brillant parcours de normalien, puis d’universitaire à Paris-VIII, spécialiste du maccarthysme, ne pourra jamais chasser ce goût indéfectible d’inachevé. C’est ce qui le poussera, dans un dernier geste, à commettre une biographie sur le poète noir américain Robert Willow. Au lendemain de la publication, et de l’ivresse qui accompagne ce moment, une «shitstorm» diluvienne s’abattra sur Jean Roscoff. Taxé d’appropriation culturelle, il va découvrir, dans le même temps, que son lexique jargonnant issu de la French Theory n’est manifestement plus à jour, et que l’on peut dorénavant être porté aux nues le matin, puis voué aux gémonies le soir venu.

En somme, Jean Roscoff est, aux yeux du millénial que je suis – avec Léonie –, un énorme «boomer». Mais c’est un boomer qui trébuche, qui essaye, dont la maladresse et les