Lors d’une soirée, à un invité qui le félicitait d’être «si élégant», Lord Brummel aurait répondu : «Pas assez, puisque vous l’avez remarqué.» C’est que l’élégance est un peu comme la modestie, qui disparaît dès qu’elle s’affirme, ou le charme, si insaisissable que, dès qu’il se «pose», il fait du charmant un charmeur. Si on ne se soucie en rien d’être élégant·e, on peut l’être tout de même, mais aussi bien avoir l’air d’être en survêt et chaussettes. Si au contraire on fait tout, si l’élégance est pensée, apprêtée, exhibée, elle risque d’être endimanchée ou frimeuse – vulgaire. Entre le trop et le pas assez (de grâce, d’harmonie, de légèreté, de finesse, d’aisance) l’espace est étroit. Aussi gagne-t-on à laisser la notion «flotter» – de sorte qu’elle entoure aussi bien une mise, un vêtement, un mouvement du cœur, un pas de danse, une association de couleurs, la verticale d’un cyprès dans une colline toscane, une skyline, la pureté d’une arche, le dressage d’une assiette, les fleurs des champs, qui jamais ne jurent… Mais cette élégance apparaît toute seule, de façon «objective» – comme une aurore boréale ou le Grand Canyon ? Elle est produite par un sujet, de façon «subjective» – comme la Jeune Fille à la Perle, le Golden Gate Bridge, la Petite musique de nuit ? Ni l’un ni l’autre ? En quel sens peut-on alors dire «élégants» le port, l’allure, le plumage d’un paon ?
Il est vrai que les formes animales semblent relever d’une est