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Roman

«Les Détails» de Ia Genberg, la vie dans les autres

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Le cahier Livres de Libédossier
La fièvre ouvre le flux des souvenirs chez la romancière suédoise.
(Nina Sinitskaya/Getty Images)
publié le 20 janvier 2024 à 3h37

Certains livres rappellent le moment où on les a lus. Le lieu, l’atmosphère, la chaleur d’un lien. Prise de fièvre, la narratrice se replonge dans la Trilogie new-yorkaise de Paul Auster vingt-cinq ans plus tard. «Fermé et souple à la fois, si simple et pourtant un peu tordu, aussi lucide que paranoïaque. Entre chaque mot s’ouvrait un ciel.» Johanna le lui avait offert quand elle était au fond de son lit après une attaque de paludisme. Sur la première page au stylo bleu : «Guéris vite, s’il te plaît.» L’effet de la température la ramène dans le couple qu’elles formaient alors. Elle avait abandonné ses études pour se lancer dans l’écriture, et Johanna, prodigue en cadeaux et en baisers, lectrice irremplaçable de ses textes, partageait la même passion pour la littérature. Bien des années après le départ brutal de Johanna, chez Sally, elle prit la décision d’arrêter d’écrire en éminçant un oignon pour des lasagnes. Ses yeux tombent aussi sur l’exemplaire râpé de Si par une nuit d’hiver un voyageur offert par Palle, et «l’air renfermé de la cuisine et le parfum des feuilles de thé dans la casserole me reviennent».

Une fille volcanique, instable psychiquement

Les livres et leur pouvoir de rémanence traversent les Détails, premier roman traduit en français de la Suédoise Ia Genberg, comme le désir d’écriture et l’incapacité à aboutir. On suit l’apprentissage de la narratrice en creux d’une piquante galerie de quatre portraits de gens qui ont compté dans sa vie. Avec en fond de cour l’