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«Les Rubâ’iyât», la poésie vin debout

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Le cahier Livres de Libédossier
Reparution de la traduction de Pierre Seghers de l’auteur perse du XIIe siècle Omar Khayyâm.
Une illustration de Gilbert James (1865-1941) des poèmes d'Omar Khayyâm. (Culture Club/Getty Images)
publié le 22 mars 2024 à 15h50

«Dis aux sages que, pour les amoureux, l’extase est le guide, et que ce n’est pas la pensée qui montre le chemin.» Dans son introduction à sa traduction rééditée des Rubâ’iyat, Pierre Seghers cite cette conclusion du Traité de métaphysique d’Omar Khayyâm, né vers 1048 dans l’actuel Iran et mort vers 1131, pour montrer le ton de la poésie du mathématicien, astronome et philosophe, surtout connu en Europe comme poète depuis la traduction des Rubâ’iyât en anglais par Edward Fitzgerald en 1859. «Qu’est-ce qu’un rubâ’ï (pluriel rubâ’iyât) ? Si l’on sait qu’on appelle “vers”, en persan, ce qui est pour nous un distique, le rubâ’ï correspond à quatre vers français», c’est un «jeu du langage et de sa musique, […] un commentaire qui résume en lui constat et médiation», écrit Pierre Seghers. Lui-même, né en 1906 et mort en 1987, fut résistant, poète et éditeur en mêlant ces trois activités (c’est à lui qu’on doit la collection «Poètes d’aujourd’hui») et il voit en Omar Khayyâm «le contraire d’un “collaborateur”», citant un texte du XIIIe siècle : «Il était sans pareil dans l’astronomie et dans la philosophie ; et sa supériorité dans les sciences serait devenue proverbiale, s’il avait reçu en partage le respect des convenances» que sa poésie dément en permanence.

«Ce sont tes yeux qu’il faut guérir»

Le vin lui était si goûteux que voici les deux derniers vers d’un rubâ’ï évoquant «le mois du Ramadan» : «Le col de la jarre est scellé, les