A un moment, il faut se mettre à table et se livrer. Cuisiner les aliments comme on mitonne les corps et les envies. Manger, s’aimer et parcourir un bout de chemin en famille, en couple ou en solitaire, derrière les fourneaux ou dans les coulisses de la petite et la grande histoire d’une île souvent sous influence et sous menace. Et toujours goûter, essayer, se dévoiler. Le Banquet aphrodisiaque est donc un curieux menu concocté par Li Ang, l’une des autrices les plus controversées de Taiwan, à la fois fougueuse et frondeuse, jouisseuse et joyeuse, comme elle apparaît ce matin d’octobre dans sa chambre d’hôtel perchée dans une tour du XVe arrondissement de Paris.
Des entrées aux desserts, son «banquet» est une succession de plats, un inédit voyage exploratoire dans le destin de l’île et les tranches de vie de Wang Chi-fang et sa famille. Un récit de passions et de sensations qui touche à tout, gratte, raille, suinte de pulsions et de fluides. «Manger est un acte instinctif. J’adore la viande, l’alimentation, la cuisine, raconte Li Ang dans un mélange d’anglais et de mandarin. Je tenais à écrire un roman complet, consistant, sur ce thème-là, sur ces plaisirs. La gastronomie est souvent liée au sexe et à l’amour, mais je voulais également intégrer la dimension politique, culturelle, et brosser un portrait historique large, de la vie à la mort, autour du personnage d’une femme.»
Autour de la civette et du pangolin
Voilà donc la jeune Wang Chi-fang, double littéraire de l’autrice. Son père n’est